Au moment de refermer L'interrogatoire de Jacques Chessex que je me suis mis à relire, je ne sais trop pourquoi, depuis la fin de la campagne des Législatives, je commence juste
à réaliser non pas ce qui est en train de se passer (un paysage politique qui se trouve chamboulé par l'élection d'Emmanuel Macron, et la politique elle-même qui va devoir
vraisemblablement changer), mais les dégâts collatéraux chez nombre de mes amis engagés à gauche.
Je ne fais pas partie de ceux qui ont vécu comme un drame intersidéral le résultat de la Présidentielle, enragent ou font leur scrogneugneu, loin de là, simplement je reste interloqué par
l'azumutage total qui semble toucher une partie des dirigeants et des militants du parti de Jaurès et de Blum.
Mon "socialisme" est plus que jamais mélancolique.
Heureusement, depuis en fait décembre dernier, j'ai aussi recours à Baudelaire, à Desnos, à, Hugo, à Courbet, Ingres, Delacroix pour m'aider à passer le cap, et à ne pas perdre de vue
l'essentiel - à me consoler et à espérer ? - car je suis presque aussi malheureux qu'eux. Et comme il est tard, minuit passé, je puis même confier que j'ai convoqué récemment Joao César
Monteiro, le remarquable cinéaste portugais de la Comédie de Dieu, où un vieux fabriquant de sorbets les goûte sur la peau nue d'employées tout aussi nues. La plupart du temps en récitant
le Cantique des cantiques !
En pensant à mes potes d'enfance Pimpin et François C, deux impénitents de la chose, qui aiment autant que moi l'odor feminae qui nous l'a toujours bien
rendu... Comme dirait Régis Debray, "la lecture sous la lampe", comme le visionnage, peut avoir du bon et être d'un grand secours, encore qu'à partir d'un certain âge, il faut veiller à
ne pas s'abîmer les yeux !
Je lisais les posts des uns et des autres et je me disais, comme beaucoup, s'agissant du PS :
Tout ça pour en arriver là ? Pour en arriver au constat que les deux finalistes de la Primaire du PS - deux anciens jeunes rocardiens ! - quittent leur parti ?! Comme dit Gilles, "
on sentait bien, progressivement, chez les « Jeunes rocardiens » des années 80, se dégager deux ailes opposées. Elles se sont envolées". Mais tout de même à ce
point, on est confondu par un tel schisme provoqué par deux héritiers de Michel Rocard.
Des scores qui ne cessent d'interroger : BH en tête de la primaire au premier tour avec 36,35 % des voix, suivi de MV avec 31,11 %. Après que le vainqueur eut obtenu 6,4% lors de la
Présidentielle au plan national et 12, 77% des voix dans sa propre circonscription (derrière EM, JLM et FF), puis 22, 61 % des voix lors de la législative qui a suivi (derrière LREM et
LR), éliminé donc du second tour, son challenger ayant de son côté obtenu 25, 5 % au premier tour de la législative et 30,30% au second, on ne peut s'empêcher de penser : mais où est-ce
que ça a merdé ?
Quelle gloire, si j'en crois certains commentaires, peut-on raisonnablement tirer de ce fiasco ? Si c'est ce que qu'on se doit à soi-même, orgueil, estime de soi. Et le destin de cette
estime, pourquoi pas ?
Sauf qu'il ne faut pas oublier les autres sens dans lesquels on n'est jamais sûr de ne pas tomber : crématoire, cendres, ossements et pourriture.
En même temps, il faut bien se résoudre à dire ce qui est. A refuser de porter un masque plus longtemps. A refuser de se farder. Sauf à décliner et à se fourvoyer irrémédiablement.
La fuite ou l'esquive ? L'emmurement ? Ou quoi d'autre ?
En attendant, je ne crois pas que le petit refrain de la "trahison" repris par les uns et les autres aide à comprendre à gauche ce qui s'est passé, sans doute pas à progresser, et pas
davantage à se dépasser.
Salut et fraternité !
Dominique Lévèque est secrétaire général du PRé.
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