Le monde d’après, c’est
maintenant
Une contribution de Jacques Archimbaud, ancien vice-président de la Commission nationale du débat public (CNDP)
Il est trop tôt pour faire le bilan de la crise du Covid 19, mais pas pour commencer à « tirer des leçons », à analyser les premiers effets de cette crise pandémique et à songer utilement à « l’après ». Le Covid-19 n’est évidemment en rien « salutaire », mais il nous permet cependant de mesurer nos fragilités et celle de nos sociétés dont le caractère non safe et non durable éclate au grand jour. C’est un chaos humain dont la réponse génère un désastre humain.
Il interroge notre rapport à la mort. Il nous amène à repenser le progrès, le monde, à nous repenser nous-mêmes et dans notre rapport aux autres. Il plaide pour une réhabilitation de l’État dans sa fonction de stratège, délaissée au fil du temps, pour sa restauration en tant que garant de la protection et de la prospérité pour tous, pour sa transmutation en un État à la fois social et écologique.
La question, aujourd’hui, pas demain, n’est pas d’attendre que ça passe, de revenir à "la normale", elle est ni plus ni moins de se ménager un monde où les humains puissent se retrouver, où leurs désirs et leurs besoins les plus basiques, la nourriture, un toit, aux plus sociaux, aux plus «humains», le besoin de reconnaissance et d’affiliation, leur désir de participer à la vie et aux décisions de la Cité, soient entendus.
Elle nous invite en ce XXI ième siècle à « faire commune ».
La question est de définir un espace où nous pourrions continuer de vivre, sans nous laisser accaparer par la peur, ni nous laisser distraire par la pensée magique ou les déconstructions hasardeuses, ni nous faire enfler par l’extension du domaine de la biopolitique, ni nous abandonner davantage à la tentation du repli tribal. Elle ne concerne pas que la stratégie de sortie progressive de l’actuelle crise sanitaire, elle commande de se préparer à la diversité des menaces : virales, dans toutes leurs formes, y compris cyber-attaques, etc. mais aussi d’anticiper le pire à venir pour amortir les conséquences des chaos dont nous savons la prévisibilité (crise climatique). La question convoque les enseignements de l’expérience vécue, mais aussi notre sens du défi et la puissance de l’imaginaire. Et notre ambition : s’agit-il de penser le « Jour d’après » ou le « monde d’après » ?
On ne va pas sortir de la crise. Autrement dit, il n’y a aura pas d’après. Mais un rappel permanent de nos vulnérabilités, de notre précarité, de la non-durabilité de nos sociétés, comme de la finitude du monde. On ne va passer d’un coup d’un monde écrasé par le désir d’accumulation à un mondé ré-enchanté qui ferait toute sa place à la confiance mutuelle, à l’émancipation et au sublime de la vie.
Mais il n’est pas interdit d’y travailler. En faisant avec les paradoxes de la situation et en se défaisant de l’illusion de perspective.
"Il n'y a pas de lendemain qui chantent, il n'y a que des aujourd'hui qui bruissent" (Alain Damasio).
18-05-2020
Notre pays s’installe comme beaucoup dans une séquence sanitaire de « stop and go » assez longue, inédite, dramatique et destructrice. Au-delà de tous ses autres effets, la situation ici peut ouvrir plus rapidement que prévu une autre alternative que l'affrontement entre le « macronisme » et l'extrême droite.
Jacques Archimbaud, militant de l’économie solidaire et de la décentralisation, spécialiste des questions de démocratie participative fut vice-président de la Commission nationale du débat public (CNDP) et président de la commission particulière du débat public (CPDP) sur la révision de la PPE (Programmation Pluriannuelle de l'énergie) de mars 2013 à juin 2018. Responsable de l'organisation du débat public, il est également à l'initiative de la création du G 400, un panel de 400 citoyens tirés au sort et chargés de suivre le débat.
Fondateur et dirigeant de différents réseaux de l’économie alternative et solidaire, participant des premières initiatives de développement local, il devient le collaborateur des anciens ministres de l’écologie, Dominique Voynet et Yves Cochet, dans le gouvernement de la "gauche plurielle" de Lionel Jospin. Juste avant, à partir de novembre 2006, il participe aux groupes de travail et aux négociations sur le programme puis sur les candidatures aux élections législatives mis en place par le PS et les Verts. Ce n’était du reste pas la première fois que les tenants de l’écologie politique discutaient avec le PS puisque les élections législatives de 1997, à la suite de la dissolution de l'Assemblée Nationale par Jacques Chirac le 21 avril, devaient marquer le premier accord législatif entre les deux partis.
Sans compter le travail de préparation en amont mené par Jean-Christophe Cambadélis, pour le compte de Lionel Jospin, qui organisa les « Assises de la transformation sociale » avec plusieurs partis de gauche qui inspirèrent la gauche. Il fut aussi le proche collaborateur de Cécile Duflot au ministère de l’Égalité des territoires et du Logement (comme directeur de cabinet adjt), après avoir entre-temps été directeur de l’Observatoire Régional des Déchets d’Île-de-France (ORDIF), puis directeur de cabinet de Dominique Voynet à la mairie de Montreuil, après plus de 22 ans d’une carrière d’enseignant en Lettres puis en Histoire dans différents lycées en Seine Saint Denis.
Parallèlement à son engagement en faveur de l’économie sociale et solidaire, Jacques Archimbaud est aussi un militant engagé politiquement puisque il fut secrétaire national adjoint d'Europe Ecologie-Les Verts (EE-LV) et qu’il assura le pilotage de la rédaction de deux programmes des Verts (2002 et 2012).
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