Pour une mise en perspective transversale et critique
"La Terre retournée" in l'expérience bleue, 100 x 70 cm huile sur toile, 2020 FL.
François Lemaire
Série PRé Le monde d’après, c’est
maintenant
Une contribution d'Abdoulaye Moussa Diallo, doctorant - PhD Candidate, Clersé (UMR 8019) Université de Lille / Lasap (ETHOS) UCAD Dakar/Sénégal, d'Ollibo Arnaud Gouekou, doctorant en 2e année au Clersé Université de Lille et d'Ivan Sainsaulieu, sociologue du travail, professeur des Universités (Lille).
« Dans le monde de l’après COVID-19, rien ne sera plus comme avant » : cette promesse n’est pas nouvelle, elle s’inscrit dans un registre (une économie de la promesse) bien connu des chercheurs sur l’innovation. Considérée comme le nouveau moteur du progrès, l’innovation est un leitmotiv important dans la politique scientifique et économique, en lien avec l’économie des promesses. La multiplication d’évènements tels que Hackathon, IN Situ ou Crunch couronne l’ « Innovation » et célèbre l’esprit entrepreneurial, estompant au fur et à mesure les frontières entre la science et la technologie, l’université et l’entreprise.
Si les chercheurs en sciences humaines et sociales n’ont pas tardé à apporter une réflexivité à cette évolution, la portée et la visibilité de leurs travaux sont relativement limitées par rapport à celles des promoteurs stars de « l’innovation », comme les patrons des GAFA.
En outre, les sciences sociales sont parfois mobilisées par les acteurs comme une alliée qui légitime la valeur de l’innovation pour le bien de la société, sans plus d’interrogation, dans une logique dès lors hétéronome.
Mais les espoirs de changement même irréels permettent de réorienter l’objet voire d’inverser la donne et de se le réapproprier dans un sens critique, en prenant au sérieux sa dimension disruptive. C’est l’objectif du Tour de l’Innovation (1) qui est ainsi de favoriser une réflexion collective sur l’objet de « l’innovation» en faisant intervenir, au cours d’une discussion scientifique, des chercheurs de domaines différents en sciences sociales. Pour « en faire le tour », ces journées sont dédiées chacune à un thème différent (genre, ingénierie, technologies du web, organisation, gouvernance, épistémologie) dans un lieu différent (Lausanne, Brest, Nice, Lyon, Paris, Lille).
L’objectif de la journée de séminaire qui sera organisée à Lille à la rentrée, est de susciter des pistes de réflexion sur « l’innovation durable ». En croisant les regards des socio-anthropologues et des économistes, cette journée de séminaire promeut un cadre critique permettant des interventions et des échanges pluridisciplinaires sur un thème commun.
Ce sont ces attendus que nous allons développer ici, car ils permettent de réfléchir sur le type d’innovation sociale qui pourra se mettre en place dans l’après COVID 19.
L’INNOVATION COMME CONCEPT SOCIO-ECONOMIQUE
Comme l’ont démontré de nombreuses recherches, l’ « innovation » ne se réduit pas qu’à une dimension technologique : elle est aussi idéologique, sociale et organisationnelle, d’où son caractère transversal en sciences sociales (Sainsaulieu et Saint-Martin dir, 2017).
Si l’ « invention » est une potentialité, un élément mis à disposition, l’ « innovation » consiste en l’implantation effective et durable de cette invention dans un milieu social, par l’assimilation sociale de la nouveauté (Alter, 2000), dans une perspective économique (Schumpeter, 1911). De ce point de vue, la notion d’« innovation durable » établit donc la relation entre l’économie et la société dans un frame de développement.
D’abord appréhendée sous un angle économique par l’économiste autrichien Schumpeter (1883-1950), l’expression « Exécution de nouvelles combinaisons productives » (1911) est alors utilisée au lieu du terme « innovation » (1928) pour désigner un procédé de recomposition de l’appareil productif qui fait émerger de nouveaux besoins parmi les consommateurs. Pour lui, l’« innovation » est un facteur endogène au capitalisme qui contribue à le transformer et qui provient d’entrepreneurs audacieux. Ainsi d’un point de vue économique, l’innovation s’inscrit dans une perspective managériale et entrepreneuriale (Schumpeter, 1911), faisant de l’entreprise le « champ » spécifique de production et d’observation des « innovations ».
Discipline pionnière dans l’étude des innovations, la science économique a pendant longtemps abordé la question de l’innovation en lien avec la croissance des entreprises. Cependant, une perspective nouvelle a émergé qui permet d’analyser l’innovation en relation avec la société et l’environnement, justifiant le glissement d’une économie dominante vers une économie hétérodoxe. Thierry Pouch et Richard Sobel (2008) rappellent à cet effet que les avancées récentes de cette hétérodoxie en économie ont ouvert sans aucun doute la voie à un rapprochement avec la sociologie, l’anthropologie et la philosophie, accentuant de manière radicale la critique de l’homo œconomicus. Toutefois, même si elle poursuit des objectifs quelque peu différents de ceux des entreprises, l’innovation est bien aussi présente dans les administrations publiques et reste en partie liée aux priorités de l’État (Gallouj, Merlin-Brogniart et Moursli-Provost ; 2015).
Cette incursion dans les services publics, notamment à travers les Partenariats Public-Privé (PPP) montre que l’innovation ne se limite plus à un processus de concrétisation dans des objets techniques (embodiment) et des « business models » associés, comme tendent parfois à le réduire les théories managériales de l’ « innovation ». Elle vise également à faire exister et à légitimer des projets collectifs qui répondent au renouvellement de biens communs, favorisent la génération d’innovations distribuées ultérieures, reconfigurent, polarisent et agencent des innovations passées et futures dans de nouveaux dispositifs d’action collective. Ces formes d’ « innovation » ne visent pas nécessairement des objectifs marchands, elles s’inscrivent aussi dans une dynamique de cohésion sociale (Gallouj, MerlinBrogniart et Moursli-Provost, Ibid) et de création d’ « écosystème » d’activités dans des zones géographiques particulières selon le concept de « Cluster » (Porter, 1998), dont les attentes de retombées socio-économiques pêchent parfois, notamment en France, par excès d’optimisme et de volontarisme (Le Roux, Lamy, 2017).
S’interroger sur les rapports entre innovations et transformations sociales peut apparaitre à contre-courant des tendances lourdes puisque les innovations ont apparemment conquis l’espace occupé jusque-là par les grandes transformations, voire le changement révolutionnaire (Lévesque, 2004). Pourtant tout changement ou nouveauté n’émerge que dans un « champ d’innovation » (Le Masson et al, 2010) où se réalise une activité collective de construction de biens communs, contrastant ainsi avec une vision restrictive de l’innovation répandue en management et qui assimile cet univers à un monde de singularités.
Les travaux en sciences sociales ont en effet montré depuis trente ans que l’innovation est également l’affaire de collectifs et de conduite d’expérimentations collectives dans l’incertain en quête de nouvelles significations (Callon, 2003 ; Akrichet al, 1988 ; Tidd et al, 2005 ; Le Masson et al, 2010 ; Verganti, 2009). Pour Le Masson et al. (op. cit.), un champ d’innovation est un domaine où s’exerce un travail de conception innovante qui consiste simultanément à générer de nouvelles lignées de concepts et de nouvelles connaissances. Mais l’innovation n’a pas seulement besoin de concepts et de connaissances, elle s’appuie avant tout sur des « milieux » qui sont eux-mêmes le produit d’une expérience de conception collective. Suivant cette même perspective, en analysant l’impact de la mobilisation territoriale sur une politique sociale, Jany-Catrice et Nirello (2019) montrent que la réussite du projet « territoires zéro chômeur de longue durée » provient de la synergie des acteurs locaux et leur volonté de coaction.Un milieu innovant correspond ainsi à toutes les conditions (langages, règles, plateformes, etc.) qui permettent à des innovations singulières de prendre sens pour des publics et pour que d’autres innovations puissent advenir, dans la perspective sociale d’un travail coopératif.
L’ACCEPTABILITE DE L'INNOVATION EN SANTE
Le consensus dans le débat sur l’innovation en santé insiste davantage encore sur le processus social qui mène à son acceptation ou à son rejet (Alter, 2002 ; Olivier De Sardan, 1995 ; Pickstone 1992). Ce processus dépend d’une multiplicité d’acteurs, humains voire « non humains » (Akrich, Callon et Latour, 1988a ; 1988b), individuels ou collectifs, qui composent le monde social et sont porteurs d’intérêts ou de valeurs divergentes (Deblock, 2012). L’innovation en santé repose sur une promesse d’amélioration ancrée dans l’imaginaire du progrès scientifique, quels qu’en soient les excès et les risques (Haraire et al, 2018).
L’accent est-il mis sur des processus de rupture ou d’adaptation ?
D’une part, l’analyse des effets d’une innovation proprement technique (imagerie, robotique, procréation médicalement assistée), l’introduction de molécules nouvelles (insecticides, antirétroviraux…) ou du numérique dans le management (Lewis et al, 2012), permettrait de saisir une rupture à l’œuvre, l’acceptation rapide de la technique par les acteurs sanitaires s’expliquant par la nécessité du recours à l’outil dans le travail. D’autre part, le processus d’acceptabilité sociale est plus lent quand le changement de comportement demandé ne correspond pas à un impératif technique. L’accent doit alors être mis plutôt sur le long terme, en vue d’identifier les facteurs de compliance et de mieux prendre en considération les acteurs ordinaires sur qui repose en pratique l’acceptabilité sociale.
Trois principaux angles d’attaque peuvent permettre de saisir l’innovation en santé :
1) les nouveautés introduites dans les systèmes de management. En matière de ressources humaines, le cas des bénévoles de santé ou Acteurs Communautaires de Santé (ACS) au Sénégal, qui suppléent le personnel qualifié dans les établissements de santé au niveau des districts sanitaires, en est une illustration (Faye, 2012).
2) On note la mise en place de nouvelles normes de prise en charge socio-biomédicale en temps normal, renforcées en temps de pandémie. Par exemple en France, avec le COVID-19 des unités mobiles de soignants, déjà en développement à l’hôpital (Castra, Sainsaulieu, 2020), ont été mobilisées pour dépister dans leur demeure les personnes suspectées d’être infectées.
3) L’articulation du sanitaire et du social préside à l’acceptabilité de la nouveauté par les usagers, acteurs de l’offre comme de la demande. Le développement de la « médicalisation de la rue » par les équipes psychiatriques de maraude pour la prise en charge des SDF (Sans Domicile Fixe), a permis de construire, dans les années 1990 et 2000 respectivement aux États-Unis et en France, des relations soignants-sociaux et soignants-soignés plus horizontales (Sainsaulieu, 2012 ; Farnarier et Sarradon-Eck, 2018). Somme toute, les recherches en « innovation durable » dans le domaine de la santé envisagent l’articulation entre les inventions (techniques, organisationnelles), le contexte de mise en œuvre (économique et culturel) et les rapports entre les acteurs (politiques, sociaux, professionnels).
VERS UNE REGLEMENTATION GLOBALE ?
L’environnement s’impose désormais comme condition nécessaire des projets et processus d’innovation. L’enjeu porte alors en effet sur l’élaboration et la construction de ce processus innovant qui, sous de multiples formes, se construit en fonction des configurations locales et sectorielles qui permettent l’émergence de liens et d’interactions favorables à cette production de nouveauté (Corneloup, 2009). Une innovation doit se légitimer par la démonstration, dans des mises en scènes collectives, qu’elle participe à la poursuite d’un bien commun qui n’est pas réductible aux intérêts des participants. Un mouvement de recomposition des cadres de l’action innovante orientée vers l’innovation totale et marqué par la production de nouvelles règles d’action impose de repenser le processus innovant au sein d’une économie hétérodoxe qui ne se concentre plus exclusivement sur les innovations technologiques mais sur un ensemble d’actions (sociales, culturelles, politiques, économiques, patrimoniales) permettant de redonner vie et sens à des échanges de proximité (Corneloup, 2009). En effet, un tel mouvement ne peut que reposer sur un principe d’hétérodoxie et de transdisciplinarité (Pouch et Sobel, 2008) qui place au centre des discussions un objet interdisciplinaire, commun à l’ensemble des sciences sociales dans la mesure où toute innovation entraine un impact à la fois économique, sociale et environnemental.
L’innovation environnementale, définie dans la littérature comme un procédé, équipement, produit, technique, ou système de gestion, nouveau ou amélioré, qui évite ou réduit l’impact environnemental (Horbach, 2008 ; Kemp et Pearson, 2007), met en lumière l’évolution du lien, à la fois social, économique et politique, entre la technique et l’environnement. Simon Nadel (2018) rappelle ainsi que l’innovation environnementale, née dans le champ de l’économie écologique, a été introduite dans le champ de l’économie de l’innovation (principalement évolutionniste) au début des années 2000. L’une des caractéristiques de l’innovation environnementale réside dans le fait qu’elle génère une double externalité, c’est-à-dire un effet externe positif envers l’environnement qui s’ajoute aux spillovers (retombées) de connaissance induits par toute innovation. Ce spillover environnemental implique un renforcement du caractère incertain du processus d’adoption d’innovations environnementales et accentue l’importance de l’aspect réglementaire et des politiques environnementales dans les mécanismes d’adoption (cf. regulatory push-pull effect; Rennings, 2000). Un des enjeux de la compréhension des processus d’innovations environnementales réside alors dans l’analyse des interactions entre les caractéristiques micro-économiques des firmes et celles de leur environnement méso- économique, au-delà de la réglementation mise en évidence régulièrement par la littérature (Galliano et Nadel, 2016).
Si la littérature sur l’éco-innovation s’est fortement orientée vers l’analyse des interactions entre réglementation environnementale et adoption d’éco-innovations (Porter 1991 ; Porter et van der Linde 1995a, b), de nombreux travaux montrent les limites de ces approches face à la diversité des comportements des firmes (Galliano et Nadel, 2013 ; Gonzalez, 2009 ; Pereira et Vence, 2012). Comprendre les processus microéconomiques de l’innovation environnementale implique ainsi de tenir compte, au-delà de la réglementation, des bases technologiques de la firme qui orientent ses capacités d’absorption et de leur interaction avec l’ensemble des conditions technologiques et marchandes portées par son environnement. Cette approche pose la question des opportunités technologiques et des conditions d’appropriation des innovations et met l’accent non seulement sur l’intensité technologique des activités et la nature des connaissances qu’elles recouvrent, mais aussi sur les modes de coordination entre acteurs et les conditions institutionnelles qui les soutiennent, comme variables clefs pour analyser les comportements éco-innovateurs.
Dans ce cadre, il s’agit de considérer l’adoption et la diffusion d’innovations environnementales par la firme comme un processus complexe et interactif, articulant les capacités d’absorption de la firme, les opportunités technologiques découlant de ses modes de coordination externe et l’ensemble des conditions d’appropriation et de diffusion portées par son environnement.
La capacité d’absorption de la firme renvoie à sa capacité d’acquérir et d’assimiler des connaissances puisées dans son environnement externe (Cohen et Levinthal, 1990). Les grandes firmes sont donc bien entendu les mieux placées pour s’adapter aux contraintes environnementales et institutionnelles. Il reste à donner le signal…
Abdoulaye Moussa DIALLO est doctorant en socio-anthropologie, PhD Candidate, Clersé (UMR 8019) Université de Lille / Lasap (ETHOS) UCAD Dakar/Sénégal.
Ollibo Arnaud GOUEKOU est doctorant en 2e année au Clersé Université de Lille, sous la direction d’Ivan Sainsaulieu, professeur titulaire.
Ivan SAINSAULIEU, sociologue du travail, politiste, est professeur des Universités (Université de Lille). Membre du Clersé (Centre lillois d’études et de recherches sociologiques et économiques), Unité mixte de recherche de l’Université de Lille et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) (UMR 8019). Chercheur associé à l’Institut d’Etudes Politiques (ex IEPHI), Université de Lausanne (UNIL). Coresponsable du réseau thématique « Justice sociale et sentiments d’injustice » (RT44) à l’Association française de sociologie.
(1) Tour de l’Innovation : "C’est une série de journées organisées autour de la France (Paris, Lyon, Lausanne, Nice, Brest, Lille) suivant des thématiques et des domaines d’application différents de l’innovation dans son acception disruptive : innovation genrée (dans les métiers d’ingénieur.e.s), développement durable, entreprise alternative, frontières de l’organisation, gouvernance scientifique, rupture épistémologique... L'objectif du Tour est de fournir une synthèse des réflexions autour de la volonté d’une réappropriation voire d’un dépassement de la notion d’innovation suivant une approche pluridisciplinaire en sociologie, en science politique, économie, anthropologie, histoire et philosophie".
N.B : Cet article d’essai de mise en perspective transversale et critique fera l’objet d’un séminaire à l’occasion d’une journée de discussion à l’université de Lille (septembre ou octobre, date à préciser).
Pour tout contact : baba.yoro22@gmail.com ; arnaudollibo@gmail.com
Références bibliographiques
- Akrich M., Callon M., et Latour B. (1988a), « Á quoi tient le succès des innovations ? 1 : L’art de l’intéressement », Gérer et comprendre. Annales des Mines, n°11, p. 4-17.
- Akrich M., Callon M., et Latour B. (1988b), « Á quoi tient le succès des innovations ? 2 : Le choix des porte-parole », Gérer et comprendre. Annales des Mines, n°12, p. 14-29.
- Alter N. (2002), « L’innovation : un processus collectif ambigu », in N. Alter (dir.), Les logiques de l’innovation : approche pluridisciplinaire, Paris, La Découverte, p. 15-40.
- Castra M., Sainsaulieu I. (2020), « Intervenir sur un autre territoire professionnel : les équipes mobiles de soins palliatifs et de gériatrie aux prises avec les services sédentaires à l’hôpital », Sciences sociales et santé (à paraître).
- Deblock C. (2012), « Présentation du dossier : Innovation et développement chez Schumpeter », Revue Interventions économiques, n° 46 [http :
//interventionseconomiques,revue.org/1852].
- Faye S. (2012), « Responsabiliser les relais communautaires pour le traitement préventif intermittent saisonnier du paludisme (TPI) au Sénégal : enjeux, modalités, défis », Autrepart, /1 N° 60, p. 129-146.
- Godefroy, M. (2019), « Une politique sociale locale consolidée par « la mobilisation territoriale ». Le cas du projet « Territoire zéro chômeur de longue durée » ». Revue française des affaires sociales, hors-série 1(HS), 183-191. doi:10.3917/rfas.190.0183, entretien réalisé le 2 avril 2019 par Florence Jany-Catrice et Laura Nirello
- Gallouj F., Merlin-Brogniart C. et Moursli-Provost A-C. (2015), « Les partenariats public-privé et leur place dans l'innovation hospitalière : quels enseignements pour le management hospitalier ? », Revue Innovation, n° 46, p. 161-195.
- Gaglio G. (2011), Sociologie de l’innovation, Que sais-je ?
- Galliano D. et Nadel S. (2016), « Les processus sectoriels de l’innovation environnementale : les spécificités des firmes agroalimentaires françaises », Economie rurale, 356 p. 47-67
- Haxaire C., Moutaud B., et Farnarier C. (2018), « L’innovation en santé : Technologies, organisations, changements », Presses Universitaires de Rennes, p. 218.
- Le Roux R., Lamy J. (2017), “Situer l’innovation ? Le concept de cluster, outil performatif pour transformer la recherche publique”, in Sainsaulieu I., Saint-Martin A. (dir.), L’innovation en eaux troubles. Sciences, techniques, idéologies, op. cit, p. 56-71.
- Lewis T., Synowiec C., Lagomarsino G., Schweitzer J. (2012), « E-health in low – and middleincome countries : finding from the Center for Heath Market Innovations », Bulletin World Heath Organisation, p. 332-340.
- Merlin-Brogniart C. (2017), « Nature et dynamique de l’innovation des nouveaux modèles de croissance : le cas de l’écologie industrielle et de l’économie de la fonctionnalité », Innovations, Vol 3, n°54, p. 65-95
- Merlin-Brogniart C. (2007), « Compétitivité, innovation et services publics marchand », Innovations, n°25, p. 205-222
- Nadel S. (2019), « Innovation environnementale et écoconception. Certitudes et controverses, Romain DEBREF (2018) », Innovations, vol. 58, n° 1, p. 279-280.
- Olivier De Sardan J-P. (1995), « Une anthropologie de l’innovation est-elle possible ? », In Essaie en socio-anthropologie du changement social, Paris, Éditions Karthala, p. 77-96.
- Pickstone J., ed. (1992), Medical Innovations in Historical Perspective, New York, St. Martin’s Press.
- Pouch T. et Sobel R. (2008), « L'hétérodoxie, quelle hétérodoxie ? », L’homme et la société, vol 4 n° 170-171, p. 9-14
- Sainsaulieu I. (2012), « La mobilisation collective à l'hôpital : contestataire ou consensuelle ?», Revue française de sociologie, 53-3, p. 461-492.
- Sainsaulieu I., Saint-Martin A., dir. (2017), L’innovation en eaux troubles. Sciences, techniques, idéologies, Editions du croquant.
- Schumpeter J. A. (1999), Théorie de l’évolution économique, Paris, Dalloz [1911], 1999.
REMERCIEMENTS à François LEMAIRE pour "La Terre retournée" in l'expérience bleue, 100 x 70 cm huile sur toile, 2020 FL.
François Lemaire artiste-peintre
LE MONDE D'APRES, C'EST MAINTENANT
Cet article d'Abdoulaye Moussa Diallo, d'Ollibo Arnaud Gouekou et d'Ivan Sainsaulieu fait partie d'une série " le monde d'après, c'est maintenant " que le PRé a lancé, sous forme d’articles, analyses, idées, tribunes d’opinion, entretiens, voire de chroniques de post-confinement, mais aussi possiblement sous forme de textes littéraires, poétiques, de gestes artistiques, de vidéos smartphone, capsule vidéos PowerPoint…
Il est trop tôt pour faire le bilan de la crise du Covid 19, mais pas pour commencer à « tirer des leçons », à analyser les premiers effets de cette crise pandémique et à songer utilement à « l’après ». Le Covid-19 n’est évidemment en rien « salutaire », mais il nous permet cependant de mesurer nos fragilités et celle de nos sociétés dont le caractère non safe et non durable éclate au grand jour. C’est un chaos humain dont la réponse génère un désastre humain.
Il interroge notre rapport à la mort. Il nous amène à repenser le progrès, le monde, à nous repenser nous-mêmes et dans notre rapport aux autres. Il plaide pour une
réhabilitation de l’État dans sa fonction de stratège, délaissée au fil du temps, pour sa restauration en tant que garant de la protection et de la prospérité pour tous, pour sa transmutation en
un État à la fois social et écologique.
La question, aujourd’hui, pas demain, n’est pas d’attendre que ça passe, de revenir à « la normale », elle est ni plus ni moins de se ménager un monde où les humains puissent se retrouver, où leurs désirs et leurs besoins les plus basiques, la nourriture, un toit, aux plus sociaux, aux plus «humains», le besoin de reconnaissance et d’affiliation, leur désir de participer à la vie et aux décisions de la Cité, soient entendus.
Elle nous invite en ce XXI ième siècle à « faire commune ».
La question est de définir un espace où nous pourrions continuer de vivre, sans nous laisser accaparer par la peur, ni nous laisser distraire par la pensée magique ou les déconstructions hasardeuses, ni nous faire enfler par l’extension du domaine de la biopolitique, ni nous abandonner davantage à la tentation du repli tribal. Elle ne concerne pas que la stratégie de sortie progressive de l’actuelle crise sanitaire, elle commande de se préparer à la diversité des menaces : virales, dans toutes leurs formes, y compris cyber-attaques, etc. mais aussi d’anticiper le pire à venir pour amortir les conséquences des chaos dont nous savons la prévisibilité (crise climatique). La question convoque les enseignements de l’expérience vécue, mais aussi notre sens du défi et la puissance de l’imaginaire. Et notre ambition : s’agit-il de penser le « Jour d’après » ou le « monde d’après » ?
On ne va pas sortir de la crise. Autrement dit, il n’y a aura pas d’après. Mais un rappel permanent de nos vulnérabilités, de notre précarité, de la non-durabilité de nos sociétés, comme de la finitude du monde. On ne va passer d’un coup d’un monde écrasé par le désir d’accumulation à un mondé ré-enchanté qui ferait toute sa place à la confiance mutuelle, à l’émancipation et au sublime de la vie. Mais il n’est pas interdit d’y travailler. En faisant avec les paradoxes de la situation et en se défaisant de l’illusion de perspective.
"Il n'y a pas de lendemain qui chantent, il n'y a que des aujourd'hui qui bruissent" (Alain Damasio).
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Dominique Lévèque (vendredi, 29 mai 2020 14:35)
Signalons qu'Ivan Sainsaulieu est l'auteur d'un article très intéressant "Le Commun : Imaginaire Ou mouvement réel qui abolit l’ordre existant ?" (au sujet du livre de Dardot et Laval) que le PRé a publié en déc 2016.