· 

LE CINEMA DE CAROLE, par Carole Aurouet


A l'occasion du colloque " Musidora, qui êtes-vous ? " qu'elle coorganise (avec Marie-Claude Cherqui et Laurent Veray), notre amie Carole Aurouet nous fait le plaisir de nous offrir une photographie de l'actrice artiste réalisatrice (1889-1957), première "Vamp" du muet, déjà évoquée par ses soins dans la série Chaque jour un  sourire contagieux pour embellir la journée publiée par le PRé pendant le 1er confinement.


 

 

Du fait du confinement, le colloque "Musidora, qui êtes-vous ?" qui devait avoir lieu les 18, 19 et 20 novembre à la Cinémathèque Robert-Lynen et au Centre national du cinéma et de l'image animée est annulé 😪😪😪
Mais nous sommes en train de rebondir en le faisant évoluer sous une nouvelle forme si bien que je vous donne rendez-vous très bientôt ! 🥳🥳🥳
Le compte-à-rebours continue donc avec une photographie de Musidora par jour 💜💜💜

Le programme est téléchargeable ici : https://cine0819.hypotheses.org/3046

 

 

 

 

 

 

 

En forme de point d’interrogation, une tête de femme cagoulée de noir s’affiche sur les murs des villes de France et d’ailleurs. Qui ? Quoi ? Quand ? Où ? C’est Irma Vep, alias Musidora, alias Jeanne Roques, muse-artiste, femme et vamp, née à Paris en 1889 et amenée à figurer pour toujours au firmament des étoiles du cinéma mondial. En 1915, elle apparaît au public moulée d’un collant noir et courant sur les toits de Paris dans Les Vampires, serial culte de Louis Feuillade.

 

Le mythe est en marche. Les yeux sont fascinés et les cœurs s’enflamment. Les poètes, parmi eux les futurs surréalistes, fixeront son image par les mots et contribueront à son immortalité. Mais derrière le mythe, il y a la femme. Jeanne Roques naît dans une période décisive pour la modernité, pour la création dans tous les domaines artistiques comme techniques. Ses parents sont des progressistes. Son père, philosophe et musicien, et sa mère, engagée dans les luttes féministes, encouragent leur fille dans ses choix. Jeanne envisage d’abord une carrière de peintre et de dessinatrice et étudie au cours Frémiet. Puis elle apprend l’art dramatique chez Mévisto et démarre à seize ans une carrière au music-hall.

 

Guidée par Pierre Louÿs, c’est dans Fortunio de Théophile Gautier, qu’elle choisit son nom de scène, Musidora, s’identifiant au personnage fatal et singulier du roman. Sur la scène du Ba-Ta-Clan, elle rencontre Colette, figure décisive pour sa carrière et pour sa vie. Devenue une des principales vedettes des grandes revues parisiennes, elle chante et danse dans les music-halls de Paris et de France. Feuillade la remarque aux Folies-Bergère et l’engage pour le rôle d’Irma Vep dans Les Vampires, succès populaire de la Grande Guerre. Première « star » française du cinéma, elle enchaîne les rôles pour les plus grands cinéastes, sans jamais cesser de se produire sur scène. Passionnée par leur travail, elle crée Les Films Musidora et passe derrière la caméra. Lors de ses déplacements artistiques, elle découvre l’Espagne, et choisit, pour y tourner, d’adapter le roman historique de Pierre Benoît, Pour Don Carlos. Durant sa liaison avec le rejeoneador Antonio Cañero, elle réalise pour lui Sol y Sombra et La Tierra de los Toros.

À la fin des années 1920, elle se marie, devient mère et s’installe en province.

Là commence sa carrière de romancière, poète, dramaturge, professeur, metteur en scène ; elle renoue également avec la peinture. En 1942, divorcée et de retour à Paris, elle devient un membre fondateur de la Cinémathèque française, en charge de la commission sur les recherches historiques, fonction qu’elle occupera jusqu’à son décès en 1957. Après son livre publié en 1978, Musidora, la dixième muse, Patrick Cazals lui consacre en 2013 un documentaire éponyme projeté dans de nombreux festivals et institutions patrimoniales. Depuis, l’intérêt pour Musidora ne cesse de grandir.

 

Le colloque « Musidora, qui êtes-vous ? » se propose d’étudier la figure de Musidora sous tous ses aspects, les plus connus comme les plus secrets. Son parcours est emblématique de l’émancipation féminine au début du XXe siècle, tant au niveau social qu’artistique. Actrice et artiste complète, objet de fantasmes et femme d’avant-garde, elle s’impose aujourd’hui comme une figure majeure du cinéma muet, continuant à alimenter l’imaginaire collectif. Les communications proposées permettront d’approfondir la réflexion sur le mythe et de mettre en lumière les activités plus méconnues, inédites parfois, de Musidora.

 


Carole Aurouet est docteur en littérature et civilisation françaises et latines, maître de conférences HDR à l’Université Gustave Eiffel en Etudes cinématographiques. Elle est membre de l’Institut de recherche en cinéma et audiovisuel. Elle fait partie du consortium du projet ANR Ciné08-19 (histoire du cinéma en France de 1908 à 1919) porté par Laurent Véray. Spécialiste de l’œuvre protéiforme de Jacques Prévert (théâtre, poésie, cinéma, collages), ses recherches sont aussi centrées sur les relations qu’entretiennent la littérature et le cinéma, et plus spécifiquement la poésie et le cinéma. D’autres poètes sont ainsi au centre de ses travaux : Guillaume Apollinaire, Pierre Albert-Birot, Antonin Artaud, Robert Desnos, Benjamin Péret, etc. Dans ce cadre, elle convoque la génétique scénaristique, pour mettre en exergue les sentiers de la création cinématographique, tant au niveau de l’attribution du travail des uns et des autres dans une entreprise collective qu’au niveau de la spatialisation de la pensée créatrice ou encore de la socialisation de l’écriture scénaristique.

Au sein de l'école doctorale Arts & Médias de la Sorbonne nouvelle - Paris 3, elle dispense depuis 2019 un séminaire doctoral sur la critique génétique scénaristique.

Carole a créé et dirige la merveilleuse collection « Le cinéma des poètes » (Nouvelles éditions Place). Elle est également directrice de deux autres collections : "Les meilleurs films de notre vie" et  "Les films sélectionnés" aux éditions Gremese.

 

Derniers ouvrages parus :

" Jacques Prévert, détonations poétiques ", codirection avec Marianne Simon-Oikawa (Classiques Garnier, 2019).

" Pierre Albert-Birot (1876-1967) : Un pyrogène des avant-gardes ", codirection avec Marianne Simon-Oikawa (PUR, 2019).

" Le Cinéma de Guillaume Apollinaire. Des manuscrits inédits pour un nouvel éclairage "(Ed de Grenelle, 2018).

" L'étoile de mer, Poème de Robert Desnos tel que l'a vu Man Ray " (Ed Gremesse, 2018)

Écrire commentaire

Commentaires: 0