LE POST POETIQUE DOMINICAL DE TIMOTHY ADES
La Naissance de Vénus, Botticelli, Galerie des Offices, Florence
" J'aurais dû (...) / Voir le baiser sur sa bouche / Plus que l'insecte à son cou.
On eût dit un coquillage ;..."
Un grand merci à Geneviève Lemé ! Cette amie du PRé, fidèle lectrice de notre page FB, qui a répondu à ma Coccinelle de Robert DESNOS (publiée dimanche dernier) en nous offrant la Coccinelle de Victor HUGO.
Extrait de son poème lyrique Les Contemplations rassemblant les "Mémoires d’une âme" - celle d'Hugo - situé dans le 1er tome ("Autrefois" 1830-1843), dans le livre premier intitulé l "Aurore", ce poème est assez remarquable quand à l'harmonie du fond et de la forme : sous l'apparence d'une fabulette presque enfantine, Hugo (il a 54 ans au moment de sa publication)) nous confie un moment de son apprentissage amoureux alors qu'il était un adolescent, quasi jeune homme (16 ans). Il y sourit - et nous fait sourire - de sa naïveté d'alors, comme il invite à réfléchir sur soi.
Aussi, la voici, cette Coccinnelle de Victor HUGO, je l’ai naturellement traduite en anglais : et j’ajoute la charmante Coccinelle de l'instituteur et poète belge Maurice CARÊME (la bouche de la jeune fille serait-elle franche ou fraîche ? Je ne sais pas).
Bon dimanche à toutes et à tous !
T.A
LA COCCINELLE - Victor HUGO
Elle me dit : Quelque chose
Me tourmente. Et j'aperçus
Son cou de neige, et, dessus,
Un petit insecte rose.
J'aurais dû - mais, sage ou fou,
A seize ans on est farouche,
Voir le baiser sur sa bouche
Plus que l'insecte à son cou.
On eût dit un coquillage ;
Dos rose et taché de noir.
Les fauvettes pour nous voir
Se penchaient dans le feuillage.
Sa bouche franche était là :
Je me courbai sur la belle,
Et je pris la coccinelle ;
Mais le baiser s'envola.
- Fils, apprends comme on me nomme,
Dit l'insecte du ciel bleu,
Les bêtes sont au bon Dieu,
Mais la bêtise est à l'homme.
La Coccinelle chantée par le Ténor Maxime Melnik sur une musique de Georges BIZET : https://www.youtube.com/watch?v=_ZBgSsji79w
https://www.youtube.com/watch?v=j8OdDs8ksrU
THE LADYBIRD - Victor Hugo
She told me ‘Something’s tickling’, and I checked,
looked at her snowy neck, and on it saw
a little pink insect...
...and not - but at sixteen one’s what-the-heck
naughty or nice - the kiss upon her lips:
just the bug on her neck.
You’d say, from this pink back, spotted with black,
a shellfish… Warblers in the foliage
were craning for a look.
Her mouth, so free! I hovered by the fay,
bent to her beauty, took the ladybird:
but the kiss flew away.
‘Look at my name: we darling beasts are holy,’
says the sky-flyer: ‘we are Our Lady’s birds;
mankind wreaks beastly folly.’
Translation: Copyright © Timothy Adès
La Coccinelle chantée par Cécila Bartoli, Myung Whung au piano, sur la musique de Bizet :
Victor Hugo à 16 ans
- Hugo jeune homme
- Les contemplations. Autrefois, 1830-1843 / par Victor Hugo ( Paris : J. Hetzel & A. Quantin, 1910), recueil de 158 poèmes écrits entre 1846 et 1855 et rassemblés en 6 livres. Victor Hugo les a publiés en 1856. Livre premier: "Aurore", C’est le livre de la jeunesse . Le poète évoque ses souvenirs de collège, ses premiers émois amoureux (Lise), ses premières luttes littéraires (Réponse à un acte d’accusation). Il chante la beauté du printemps et la joie du rêveur devant un beau paysage ou le spectacle en plein air (La fête chez Thérèse).
- Livret Musique de Camille Saint-Saëns sur le poème de Victor Hugo. - Dédicace à Monsieur Victor Capoul. - Date de composition : 1868. - 1re éd. : 1896 (Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France)
- Portrait de Victor Hugo par RODIN / RMM Grand Palais
La COCCINELLE - Maurice CARÊME (1899-1978)
Je ris dans les bluets,
Je mange dans les lis,
Je lis dans les oeillets,
Je bois dans les narcisses.
Et, couchée dans les citronnelles,
Je rêve si longtemps de bleu,
Moi, la petite coccinelle,
Que je deviens bête à bon Dieu.
https://www.youtube.com/watch?v=8QiPwx4bpyY
https://www.youtube.com/watch?v=PHgjgWzO8Xc
THE LADYBIRD – Maurice CARÊME
I laugh among the cornflowers,
I dine among the lilies,
I read among the gillyflowers,
Drink in the daffodillies.
I slumber in verbena,
In the blue my dreams have soared:
That’s why in France they call me
The beetle of the Lord.
Translation: Copyright © Timothy Adès
Maurice Carême, photo de Jeannine Burny , Fondation Maurice Carême
Timothy Adès est un poète traducteur-britannique, spécialiste de la versification, des rimes et des mètres, en français, espagnol, allemand et grec. Fin connaisseur, entre autres, de Victor Hugo, Robert Desnos, Jean Cassou, Guillaume Apollinaire, Georges Pérec, Gérard de Nerval, Louise Labé, de Federico García Lorca, d'Alberto Arvelo Torrealba, d'Alfonso Reyes, de Bertold Brecht, Hermann Hesse, Heinrich Heine et d'Angelos Sikelianos.
Il a aussi réécrit les Sonnets de Shakespeare en évitant la lettre e et a écrit une longue poésie n’utilisant aucune voyelle, sauf le e.
"Ambassadeur" de la culture et de la littérature française, il est le premier à avoir traduit les "Chantefables" de Robert Desnos en anglais. Lauréat des Prix John Dryden et TLS Premio Valle-Inclán.
Timothy Adès est membre du conseil scientifique du PRé, co-animateur de la rubrique "Tutti Frutti " (chroniques et rendez-vous culturels, poétiques, éco-gastrosophiques, pour « cueillir le jour » au sens du fameux carpe diem emprunté au poète latin Horace. Au gré des envies et des propositions des uns et des autres. Publiés généralement le week-end).
Derniers ouvrages parus : " Alfonso Reyes, Miracle of Mexico " (Shearsman Books, 2019). Bilingual Spanish/English, "Robert Desnos, Surrealist, Lover, Resistant " (Arc Publications, 2017) : 527 pages, bilingual text, les poèmes de Desnos avec les versions de Timothy Adès.
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