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EPIPHANIE par Pierre Emmanuel / Timothy Adès


LE POST DOMINICAL DE TIMOTHY ADES


 

  Pierre Emmanuel (1916-1984), de son nom d’origine Noël Mathieu, poète, enseignant et journaliste, venu à la poésie par la lecture de La Jeune Parque de Valéry, L’après-midi d’un faune de Mallarmé, les romantiques allemands (Hölderlin) et les auteurs anglais (Hardy, Hopkins), dont la reconnaissance vint avec Tombeau d'Orphée (1941), est un homme très distingué : Comité des Résistants de la Drôme; collaborateur des journaux Les Étoiles, Le Monde, Le Figaro Littéraire, Le Figaro, Témoignaqe chrétien, Réforme, France catholique et de plusieurs revues dont Arts, La Revue du Caire, Esprit; chef des services anglais puis américains de la RTF de 1945 à 1959.

 

Portrait de Pierre Emmanuel par Willy Eisenschitz

Il est élu membre de l’Académie française en 1968, président du PEN International entre 1969 et 1971 - avant lui Arthur Miller, après lui Heinrich Böll - président du PEN Club français de 1973 à 1976 ; président de l’Institut National de l’Audiovisuel à partir de 1975. On lui doit l'idée de la Vidéothèque de Paris et la Maison de la Poésie.

Militant des Droits de l'Homme, il fut  directeur puis président de l'Association internationale pour la liberté de la culture (qui succéda en 1967 au "Congrès pour la liberté de la culture" où Pierre Emmanuel travailla comme directeur littéraire, puis comme secrétaire général adjoint ), s'engageant sur tous les continents pour la liberté des artistes et des intellectuels, censurés, emprisonnés, torturés, portant haut notamment la cause d'Alexandre Soljenitsyne... 

Lauréat des Prix Saint Vincent 1945, Prix Capri 1958, Grand Prix de la Poésie Française 1968, Prix Alfred de Vigny 1982.

En 1976, il donne ‘avec éclat’ sa démission de l’Académie, suite à l’élection de Félicien Marceau. (Le cas n’est pas unique, comme le disent certains : il y a Dupanloup/Littré et Benoît/Morand).

 

Épiphanie

 

Or de la foi qui tout achètes

En un monde où rien ne se vend

Mais du nôtre perdu de dettes

Ne combles pas même une dent

 

Fine cendre de l’espérance

Cœur qui nais de te consumer

Élevant à Dieu ton encens

Qu’ici-bas nous nommons fumée

 

Toi qui vis dans ce monde comme

La myrrhe au désert Charité

Pour garder ces morts que nous sommes

De leur corruptibilité

 

Vous êtes le don que les trois

De bien de grandeurs revenus

Offrirent au plus grand des rois

Couché dans une étable et nu

 

Sa voix : https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/pierre-emmanuel-limagination-est-aussi-importante-pour-le-savant-quelle-lest-pour-lartiste-0

 

Epiphany

 

You buy it all, you Gold of Faith,

where nothing’s sold, and all has worth;

but here on our debt-blighted earth

you cannot even cap a tooth.

 

You ash of Hope, of confidence,

courage that’s born as you consume,

you raise to God your Frankincense,

that we below call scent and fume.

 

You, dwelling in this world like Myrrh

in the bare desert, Charity:

you save these corpses that we are

from our corruptibility.

 

You three: the gift that kings, who’d known

the splendours that surround a throne,

gave to the greatest King of all,

laid naked in a cattle-stall.

 

 

 

 

 


- Pierre Emmanuel (2ième à droite sur la photographie) engagé dans la Résistance, ici dans la Drôme. Durant la guerre, réfugié à Dieulefit, il poursuit son œuvre poétique avec Tombeau d’Orphée, Le Poëte et son Christ, et des œuvres de résistance : Combats avec tes défenseurs, Jour de colère, La liberté guide nos pas. Il collabore à Fontaine, Poésie 41 etc., Traits, Combats… En 1944, Pierre Emmanuel est membre du Comité départemental de libération de la Drôme et participe à une commission d’enquête sur le Vercors.

- Tombeau d’Orphée paraît en mai 1941 aux éditions Poésie 1941, Pierre Seghers, Les Angles. L’oeuvre peut se « lire comme le drame du premier amour perdu, mais aussi comme celui de la quête de l’identité. Le livre s’ouvre sur "Les noces de la mort" qui affirme Eurydice morte dès le départ : elle est un des visages de la Mort, l’amour lui-même est mortifère et la femme aimée est l’enjeu d’un mortel et blasphématoire conflit entre le "dieu jaloux" et le poète coupable d’un crime qu’il ne sait nommer. [...] Le livre reproduit ensuite le schéma de la descente aux enfers et de la remontée au jour jusqu’à la disparition d’Eurydice et la dilacération d’Orphée [...] (Cf.Anne-Sophie Constant, notice de Tombeau d'Orphée, Œuvres poétiques complètes, t. 1, L’Âge d’Homme, 2001).


Timothy Adès est un poète traducteur-britannique, spécialiste de la versification, des rimes et des mètres, en français, espagnol, allemand et grec. Fin connaisseur, entre autres, de Victor Hugo, Robert Desnos, Jean Cassou, Guillaume Apollinaire, Georges Pérec, Gérard de Nerval, Louise Labé, de Federico García Lorca, d'Alberto Arvelo Torrealba, d'Alfonso Reyes, de Bertold Brecht, Hermann Hesse, Heinrich Heine et d'Angelos Sikelianos.

Il a aussi réécrit les Sonnets de Shakespeare en évitant la lettre e et a écrit une longue poésie n’utilisant aucune voyelle, sauf le e.

"Ambassadeur" de la culture et de la littérature française, il est le premier à avoir traduit les "Chantefables" de Robert Desnos en anglais. Lauréat des Prix John Dryden et TLS Premio Valle-Inclán.

Timothy Adès est membre du conseil scientifique du PRé, co-animateur de la rubrique "Tutti Frutti " (chroniques et rendez-vous culturels, poétiques, éco-gastrosophiques, pour « cueillir le jour » au sens du fameux carpe diem emprunté au poète latin Horace. Au gré des envies et des propositions des uns et des autres. Publiés généralement le week-end).

Derniers ouvrages parus : " Alfonso Reyes, Miracle of Mexico " (Shearsman Books, 2019). Bilingual Spanish/English, "Robert Desnos, Surrealist, Lover, Resistant " (Arc Publications, 2017) : 527 pages, bilingual text, les poèmes de Desnos avec les versions de Timothy Adès.

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