Ancienne élève de ENS Sèvres (1967), Paris Sorbonne, École française d'Athènes (1972-1977), Mary-Anne était une forte en thèmes, particulièrement brillante : agrégée de grammaire, docteur d'État (archéologie grecque), docteur en philosophie, archéologie, philosophie. Directrice de recherche au CNRS, Mary-Anne, depuis sa retraite, n’avait rien lâché de ses centres d’intérêts et de ses objets d’étude, principalement en philosophie de l’art antique.
J’aimais bien converser avec elle. Je me souviens avoir échangé avec Mary-Anne, après avoir lu - et relu plusieurs fois !- son livre l’Esthétique d’Aristote (2011) qu’elle m’avait gentiment offert et dédicacé sur un registre très affectueux qui m’avait énormément touché. Assez ardu, pas du genre que l’on peut lire dans le métro, (très) riche en informations et en analyse critique, il m’avait aussi impressionné par l’étendue de la culture de Mary-Anne, sa connaissance remarquable des textes ainsi que de la bibliographie et m’avait utilement instruit sur les débats les plus récents. Je me souviens aussi qu’elle m’avait aimablement éclairé quand je l’avais sollicitée en 2015 dans le cadre du PRé pour m'aider à trouver les traces du souci de l’écologie dans la philosophie antique.
Dans un de ses ouvrages précédents La Philosophie stoïcienne de l’art (2000) Mary-Anne, renouvelant l’interprétation de la philosophie stoïcienne dans son ensemble, menait plus particulièrement un travail (inouï) sur la dimension esthétique de la pensée stoïcienne. Y compris en procédant à d’intéressantes comparaisons avec le platonisme et l’aristotélisme et en envisageant les prolongements du stoïcisme antique et son influence sur les courants de pensée moderne.
Du lourd et du solide.
Je me dis parfois que nos hommes politiques, ceux qui pour le moins n’ont pas été pétris par les Humanités, seraient bien avisés, particulièrement en cette période de crises, de laisser la philosophie antique leur parler de temps à autre. Faut dire aussi que les Humanités ne sont malheureusement plus guère enseignées et ont tendance à être remisées, pour ne pas dire oubliées…Alors qu’elles sont vitales pour les êtres humains que nous sommes, et seraient utiles, ne serait-ce pour nous aider à survivre. Une bagatelle sic !
Mary-Anne avait 77 ans. Mary-Anne est aussi la sœur de Fay (Lifschitz) à qui vont mes pensées et de Jean-Claude Zagdoun, de son nom de plume Fabrizio Calvi, journaliste d’investigation de renomée internationale, lui aussi parti trop tôt (décédé fin octobre 2021).
Je pense à eux deux depuis samedi, comme je pense à nous autres qui restons, pauvres Terriens...
Dominique Lévèque est secrétaire général du PRé
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