
À quoi est dû le revirement de Trump sur les droits de douane ?
Sans doute est-il rassurant d'imaginer qu'il a une stratégie en tête, mais « il n'en a aucune. Seulement l'hubris et l'égotisme d'un individu », constate Le Monde. Trump a « capitulé devant le chaos qu’il a lui-même créé » (FT). « Les créanciers de l'Amérique terrassent Trump » (l'Opinion). Et il était temps :
1)Le marché obligataire s’effondrait. Ce qui signifie que plus personne ne voulait acheter de la dette américaine, faisant exploser les taux d’intérêt. Or, si l'Amérique peut survivre à une chute de 20% de l'action Google, elle ne peut se permettre de voir ses taux d'intérêt s'envoler. Les États-Unis sont le pays le plus endetté du monde et ils ont besoin des autres pour se financer. Sans oublier qu'une grande part de la dette US est entre les mains... de la Chine.
2)La matinale de Fox News (que Trump regarde) critiquait ouvertement sa politique commerciale.
3) L’opinion publique se fâche. Selon un sondage Yougov, 51% des Américains se disent « insatisfaits » de sa présidence. Sondés par CBS News, 64% veulent qu'il se préoccupe des prix et 55% veulent qu'il abandonne son obsession sur les tarifs douaniers. Trump risquait donc de perdre ses nouveaux électeurs (couches populaires des minorités, jeunes non diplômés), attirés par ses promesses de baisse de l'inflation, en contradiction avec la hausse des tarifs douaniers.
Trump est une nullité en économie. Il agit « à l'instinct » (Le Figaro). Il joue. Face à sa brutalité, peu résistent. Le shérif de la Maison-Blanche a définitivement classé les Européens parmi les apeurés empressés de lui « lécher le cul » (dixit). La Chine, elle, a soutenu le bluff et posé son gros colt sur la table : riposte équivalente, contrôle des exportations de métaux stratégiques, ventes de bons du Trésor américain. Résultat : finance US en panique et double salto arrière du cow-boy.
La Chine, dont les exportations aux USA seront taxées de +145%, a prédit que la guerre commerciale lancée par Trump se « soldera par un échec ». Pékin est en position de force. Les exportations chinoises vers l'Amérique pèsent moins de 3% du PIB chinois, mais pour le consommateur américain, elles sont in-dis-pen-sables. « Usine du monde », la Chine produit à elle seule 30% des biens manufacturés sur la planète. Et sur 700 produits majeurs (batteries, ordinateurs, smartphones, pharmacie, etc.), Pékin représente plus de 50% des exportations mondiales (FT).
Analyse de François Lenglet dans Le Figaro : « La Chine ne cédera pas, parce qu’elle pense que l’heure est venue pour elle d’affirmer son pouvoir face à l’Amérique et de prendre la place que l’Occident lui a volée en 1842, avec le traité de Nankin, mettant fin à la guerre de l’opium. C’est l’heure de la grande confrontation. Pour Pékin, Trump n’est que la dernière étape grimaçante du déclin américain, la posture politique d’une superpuissance affaiblie (...) Derrière cette guerre économique, il y a la rivalité sino-américaine pour prendre la tête de l’ordre mondial, qui est le fait majeur des prochaines années. »
La Commission européenne, elle, se félicite d'avoir fait profil bas face à Trump en ne ripostant pas, mais se dit prête à "taxer les plus grandes entreprises technologiques américaines, si les négociations avec Trump échouent » (FT). Et, craignant une déferlante de produits chinois en mal de débouchés, l'Europe va aussi entamer des négociations avec Pékin pour « amortir le choc ». Selon Le Point, Bruxelles ne manque pas d'outils pour cela, mais il y a, comme toujours, « le risque du chacun pour soi ». C'est-à-dire que chaque pays négocie pour lui.
https://www.lepoint.fr/.../l-europe-va-t-elle-etre...
Protectionnisme contre libéralisme. En France, barrières douanières et fin des traités de libre-échange figurent dans les programmes de la gauche (LFI, repris par NUPES et NFP) et du RN. C'est curieux, « on n'entend plus les populistes », ironise l'Opinion. « Silencieuses, les belles âmes qui croient que croissance et pouvoir d'achat poussent en autarcie (...) Silencieux, les étatistes toujours prêts à dauber sur le méchant marché. Ils devraient se féliciter que la seule éventualité d'un krach obligataire a freiné l'exubérance du président américain ».
En Bref : Wall Street poursuit sa chute. Fluctuations vertigineuses et effets négatifs sur l'économie mondiale sont attendus (WSJ) - En France, le scandale Nestlé des eaux en bouteille éclabousse jusqu'au sommet de l'État. Selon la commission d'enquête parlementaire, « l’Élysée savait au moins depuis 2022 que Nestlé trichait, depuis des années »- Après la carte d'identité et le permis de conduire, la carte vitale peut être mise dans nos smartphones - Deux tiers des plus de 65 ans estiment que leur pouvoir d'achat a diminué depuis leur départ à la retraite (Ouest France) - Le taux de natalité en France est en chute libre - François Bayrou s'expliquera le 14 mai devant la commission d'enquête parlementaire sur les violences sexuelles à Betharram. Et 14 établissements scolaires catholiques sont mis en cause dans des affaires de violences sur mineurs. Le Parisien publie des témoignages glaçants - Lors de la visite d'un zoo au Texas, Boris Johnson s'est fait mordre par une autruche. Elle va bien - À Philadelphie, une tortue géante des Galapagos est devenue maman, à l'âge respectable de 97 ans. Quatre magnifiques bébés tortues sont nés de sa folle passion avec Abrazzo, une tortue mâle de 96 ans.
Le pétillant duo de Michel Legrand et Nana Mouskouri.

Stéphanie Mesnier-Angeli est journaliste, écrivain et romancière.
Auteur entre autres de Barnabé - Le Roman d'un chat (Librinova, 2021), Tueuses mais pas trop (Fayard, 2015).
Egalement co-auteur de livres politiques (avec Claude Angeli): Les Micros du Canard (Les Arènes, 2014), En basse campagne (Grasset, 2002), Chirac, père et fille (Grasset, 2000), Fort Chirac (Grasset, 1999), Sale Temps pour la République (Grasset, 1997), Le Nid de serpents: bataille pour l'Elysée 1993-1995 (Grasset, 1995), Notre allié Saddam (Orban, 1992).
Stéphanie Mesnier-Angeli est une contributrice du PRé et livre cette Revue de presse depuis septembre 2024.
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